Une observation

Un garçon né à terme présente à J15 un malaise avec hypotonie 25 minutes après la tétée. Au cours de l’hospitalisation motivée par ce malaise, on pratique un EEG, un ECG et un Holter, qui se révèlent normaux. La fibroscopie montre une œsophagite de stade 1. La pHmétrie retrouve un pourcentage de temps passé à pH inférieur à 4 de 15%. Un traitement anti-reflux est institué, associé à du Raniflex® et à du Prantal®. Au cours du premier mois de vie apparaissent un eczéma et une constipation.

A l’âge de deux mois, l’enfant est hospitalisé de nouveau pour un malaise : la fibroscopie retrouve une œsophagite de stade 1 ; le TOGD témoigne de la présence de RGO ; la recherche d’IgE spécifiques (RAST antiPLV) est négative. L’enfant est mis sous traitement par Mopral®. A trois mois, l’allaitement au sein est arrêté ; la diversification de l’alimentation est débutée à quatre mois.

A sept mois et demi, l’enfant présente un autre malaise avec hypotomie et perte de connaissance. L’ECG, le Holter, l’échographie cardiaque et l’EEG sont normaux ; la fibroscopie retrouve toujours une œsophagite de stade 1 ; la pHmtrie est toujours pathologique (pH inférieur à 4 durant 15% du temps). Le bilan allergologique retrouve un test de perméabilité normal, des tests cutanés positifs pour les protéines du lait de vache, le blé, la tomate, l’arachide, l’œuf, la banane. L’institution d’un régime associé à la prescription de Débridat® et de Motilium® permet la disparition des malaises et de la constipation.

Ultérieurement, la réintroduction  des protéines du lait de vache provoque une aggravation de l’eczéma et de la constipation. ; celle du blé entraîne une urticaire ; le contact d’œuf avec les lèvres génère une urticaire accompagnée d’une perte de connaissance ; la réintroduction de la banane et de l’arachide se fait sans problème.

Malaise allergie et RGO

La fréquence de l’allergie alimentaire est globalement estimée, aux Etats-Unis, à 10% (13% chez l’enfant, 7% chez l’adulte).

Dans le cadre des malaises du nourrisson, la relation avec l’allergie est-elle médiée par le RGO ? Plusieurs études témoignent en effet de la fréquence du RGO chez les enfants allergiques. Une étude de Staiano sur 25 enfants allergiques retrouve ainsi un RGO chez 16 de ces enfants, une allergie aux protéines du lait de vache dans 4 cas, une allergie aux protéines du lait de vache associé à un RGO dans 4 cas également.

Dans une autre étude portant sur 204 enfants présentant un reflux à l’âge de six mois, le diagnostic d’allergie aux protéines du lait de vache a été porté dans 85 cas (42%).

Enfin, il est probable également que le malaise dans le cadre d’une allergie peut être une manifestation d’anaphylaxie a minima.

Dans notre observation, la perte de connaissance associée à l’urticaire lors du simple contact avec l’œuf évoque une réaction anaphylactique.

Conclusion

L’allergie alimentaire est un phénomène fréquent. Dans le cadre des malaises du nourrisson , l’existence d’une allergie doit être recherchée en cas de RGO sévère. L’implication de l’allergie dans les malaises du nourrisson est une réalité ; sa fréquence dans ce contexte reste toutefois totalement méconnue.

Docteur de Boissieu, service de pédiatrie générale et néonatalogie, hôpital Saint-Vincent de Paul, Paris